Ce jour de grève dans la fonction publique, et parfois au delà, nous étions le matin 400 à Montluçon, 300 à Vichy, et l’après-midi 600 à Moulins dont des manifestants venus de tout l’Allier.
CGT, FO, FSU et Solidaires se retrouvent jeudi à 18 h., salle du Temps libre à Moulins (Moulins Sud, entre la clinique St Odilon et le collège Emile Guillaumin) pour un MEETING unitaire contre les ordonnances Macron, pour le droit du travail.
Voici le texte de l’intervention commune de toutes les fédérations, lu à Moulins :
Toutes les fédérations de la fonction publique, tant d’Etat que territoriaux et hospitaliers, ont appelé aujourd’hui mardi 10 octobre les travailleurs des services publics, fonctionnaires mais aussi contractuels et précaires, à la grève et à l’action pour nos revendications communes : CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, UNSA, Solidaires.
C’est qu’il y a péril en la demeure. Péril pour les personnels, péril pour leurs statuts, péril pour le service public, péril pour les usagers, et donc péril pour l’égalité des citoyens qui ne peut vivre et progresser que par le service public !
Celui qui n’est pas ministre de la Fonction publique, car il n’y a pas de ministre de la Fonction publique dans l’actuel gouvernement, mais, ouvrez les guillemets, « ministre de l’Action et des Comptes publics », fermez les guillemets, M. Gérald Darmanin, entend mettre en oeuvre la volonté présidentielle de suppression de 120 000 postes de fonctionnaires, 70 000 dans les collectivités locales et 50 000 dans les Hôpitaux.
Moyennant quoi, tout en rappelant cet objectif, il a déclaré dans un entretien au Monde que les fonctionnaires devraient s’estimer rassurés du fait qu’il n’annonce la suppression « que » de 1600 postes immédiatement dans la Fonction publique d’Etat !
La manière gouvernementale de compter les suppressions de postes est d’ailleurs curieuse. Le ministre de l’Education nationale M. Blanquer annonce la stabilité des moyens dans les lycées et collèges et leur progression dans les écoles, alors que son budget prévoit 2600 postes en moins soumis aux concours de recrutement dans le second degré et 2161 en moins dans les écoles, chiffres qui ne sont pas compris dans ceux de M. Darmanin !
La réduction du nombre de fonctionnaires n’est pas une économie, c’est un refus d’investissement public pourtant nécessaire au pays et aux besoins sociaux.
De manière immédiate, le service public vient d’être attaqué par le plus grand plan de licenciement de notre histoire : la suppression de 149 000 contrats aidés, essentiellement des contrats uniques d’insertion ou des contrats d’avenir.
Le chômage de masse depuis des années a permis la création, à la place de postes statutaires, de tels contrats au rabais, instituant la précarité. Mais leur suppression ne réduit en rien la précarité puisqu’elle envoie des milliers de personnes au chômage.
Et par le vide qu’elle créé elle met le doigt sur l’utilité sociale et la nécessité des missions que ces personnes assumaient, dans les collectivités locales et en complément ou accompagnement des missions publiques de santé et d’éducation, dans le sport et la culture. Cette situation, qui a provoqué le report de la rentrée scolaire dans de nombreuses communes en France, qui soulève la protestation des élus locaux et des associations, souligne un fait évident : au lieu de réduire le nombre de fonctionnaires, il faut l’augmenter, au lieu de renvoyer à Pôle emploi les contrats aidés, il faut organiser de manière négociée les modalités de leur recrutement sur des postes statutaires.
Les mêmes décideurs qui renvoient des jeunes, des personnes en difficulté, voire des handicapés, au chômage, font des fonctionnaires leur cible. Voila qui prouve bien que personnels à statut et personnels précaires sont ensemble dans le viseur et doivent ensemble agir pour des créations de postes, pour le service public.
Et les mêmes décideurs qui s’en prennent aux emplois s’en prennent aux salaires. Les prétendues économies faites sur l’emploi ne servent pas aux salaires, et les prétendues économies faites sur les salaires ne vont pas à l’emploi. Tout cela va donc ailleurs …
Dés juin dernier, M. Darmanin a annoncé le blocage du point d’indice salarial de tous les fonctionnaires. Bloquer les salaires des fonctionnaires, et avec eux ceux des nombreux CDI de droit privé et contractuels qu’emploie de plus en plus la fonction publique, tel est son programme.
Alors que depuis 2010 le point était gelé, une seule revalorisation limitée (1,2% mais 0,4% de prélèvement supplémentaire pour les pensions et 0,2% d’inflation non rattrapée) est intervenue pour juillet 2016, et nous sommes maintenant dans un contexte de remontée de l’inflation. On irait vers un recul de 1,3% en moyenne du salaire réel chaque année (1% d’inflation prévue et 0,3% de prélèvement pour les pensions) ! C’est aggraver la dégradation du niveau de vie déjà vécue par plus de 5,4 millions d’agents de la Fonction publique.
Geler le point d’indice c’est nier les missions, les qualifications professionnelles et le rôle des agents publics, c’est méconnaître leur engagement quotidien pour l’intérêt général.
Au delà même de ce blocage, le projet d’une décorrélation du point d’indice des fonctionnaires territoriaux est évoqué publiquement. Sans doute pour inciter les élus locaux à se rabattre contre les personnels territoriaux pour assumer les économies forcées qui leur sont imposées. Ce serait là une rupture d’égalité extrémement grave, ouvrant la voie à d’autres décorrélations – pourquoi pas entre les territoires eux-mêmes ? On entrerait alors dans une logique de dislocation de la fonction publique républicaine. Voila où conduirait ce ciblage archaïque, rétrograde, des fonctionnaires pour des raisons budgétaires à courte vue.
M. Darmanin a en outre annoncé un report le 11 juillet dernier, puis parlé d’un étalement, voire d’un éclatement, des mesures relevant du protocole Parcours Professionnels Carrières et Rémunérations. Que nos fédérations aient jugé approprié ou non d’avaliser ces mesures en 2015, toutes se retrouvent aujourd’hui pour s’opposer à ce qui serait un tour de vis salarial de plus. En effet, si l’on met bout à bout l’ensemble de ces mesures, annonces et projets et matière salariale, alors il s’avère pour le plus grand nombre que les avancements d’échelons et les promotions permettent tout juste de maintenir le pouvoir d’achat mais pas de l’améliorer, et qu’à l’échelle d’une profession, la reconnaissance des métiers et des qualifications se dégrade. La progression salariale d’un agent public consiste à remonter un escalator qui descend. C’est inacceptable. Et ajoutons pour couronner le tout que le décret annuel sur la Garantie individuelle de pouvoir d’achat, qui vient en aide à certains personnels dont le revenu réel a reculé, n’est toujours pas sorti du ministère qui, manifestement, fait de la rétention.
Une discussion salariale a été annoncée pour aujourd’hui, mais son objet officiel n’est précisément pas de discuter du point d’indice, ni de l’ensemble de ces mesures et annonces, mais de la compensation éventuelle et partielle de la prochaine hausse de la CSG, annoncée pour effectuer la fiscalisation d’une très grande partie des budgets de la sécurité sociale : une hausse qui viendrait à son tour amputer le pouvoir d’achat. Ce n’est donc pas une véritable négociation, reposant sur la reconnaissance de demandes réciproques.
Refus des suppressions de postes, refus des licenciements de contrats aidés alors qu’il faudrait créer des postes statutaires, hausse du point d’indice et exigence de véritables négociations salariales, voila ce qui nous rassemble aujourd’hui. Ajoutons-y l’insulte. M. Darmanin a annoncé en juin le retour de la journée de carence qu’avait un temps mis en place M. Sarkozy : petite grippe, coup de fatigue, burn out rampant, payez, c’est bon pour les « comptes publics » !
Cette méprisable petite mesquinerie s’autorise d’une légende urbaine idéologique : la journée de carence serait une avancée vers l’égalité entre les travailleurs productifs du privé et les feignants improductifs du public !
Double légende urbaine, double fumisterie, car dans le privé, le code du travail impose certes trois jours de carence, qui s’appliquent d’ailleurs aussi aux nombreux salariés de droit privé du public, mais les deux tiers des salariés sont à ce jour couverts par des accords d’entreprises ou par des conventions collectives. Et il semblerait d’après les statistiques que là ou il y a journées de carence, les salariés arrêtés ont tendance à prolonger leurs arrêts.
Emplois, salaires, statuts, missions, journée dite de carence : on dirait bien que pour ce ministère qui n’est pas celui de la Fonction publique, la fonction publique, justement, constitue l’ennemi, la cible, l’obstacle.
Il faut en effet affaiblir les services publics pour appliquer une politique d’ensemble qui vise les salaires réels tant en matière de droit du travail que de protection sociale.
C’est pourquoi s’est réalisée l’unité des fédérations de fonctionnaires, c’est pourquoi notre unité va dans le sens de l’action commune de l’ensemble des salariés, actifs, chômeurs, retraités, en formation, de ce pays, pour défendre et améliorer la civilisation du code du travail, de la sécurité sociale et des services publics.
C’est pourquoi nous exigeons de véritables négociations, et non pas des convocations à des grandes messes dont l’objectif a déjà été annoncé médiatiquement par avance. Nous demandons donc aujourd’hui une audience à M. le préfet en personne pour adresser ce message unitaire au gouvernement.
Voici le texte de la motion commune remise à la Préfecture :
MOTION.
M. le préfet de l’Allier,
les organisations syndicales soussignées, au nom des personnels qu’elles représentent, des grévistes et des manifestants de ce jour, demandent avant tout l’ouverture au niveau national de véritables négociations salariales dans la Fonction publique, prenant en compte nos revendications communes pour l’ensemble des personnels, fonctionnaires, contractuels et CDI.
Nous demandons communication au gouvernement de nos revendications communes :
-non pas supprimer 120 000 fonctionnaires sur le quinquennat, mais investir dans le service public par des créations de postes de fonctionnaires,
-annulation de la suppression des contrats aidés et création des postes statutaires nécessaires,
-pas de gel du point d’indice salarial, maintien d’un point d’indice commun aux trois fonctions publiques, rattrapage des salaires depuis 2000,
– pas de hausse de la CSG,
-abrogation de la mesure mesquine, vexatoire et inutile concernant le rétablissement de la journée de carence.
Nous regrettons de ne pas être reçus par M. le Préfet lui-même ce 10 octobre au moment ou nos organisations se rendent devant la préfecture.
Les unions départementales CFDT, CFTC, CFE-CGC, CGT, FO, FSU, UNSA, Solidaires, de l’Allier.