Tout stratège commet des erreurs d’appréciation, surtout s’il est imbu de lui-même.
L’erreur la plus banale envers la « grève du Bac » du 17 juin dernier était de croire qu’il ne s’agissait que d’une queue de comète minoritaire, alors qu’il s’agissait d’une action de francs-tireurs adossés à la masse de leurs collègues !
Probablement auto-abusé, M. Blanquer a donc voulu monter le ton à l’encontre des actions de grèves portant sur les corrections, notations et jurys. Il a introduit deux éléments de langage faisant clairement « monter la sauce », sonner le clairon et frémir les bons soldats : « prise d’otage » et « sanctions disciplinaires », et puis, de toute façon, « tous les résultats seront communiqués en temps et en heures ».
Au delà du ridicule, nous constatons la même dérive dont tout cet exécutif semble affecté et que la FSU 03 dénonçait lors du CDEN du 2 juillet : la désinvolture la plus irresponsable envers le droit et envers les textes, en commençant par inventer le principe d’extension indéfinie du nombre de jours de grève retenus pour qui aurait fait grève un jour de correction …
Mais voila le citoyen Blanquer acculé, mercredi soir 3 juillet : il y a bel et bien des notes qui ne sont pas rentrées, au Bac, par dizaines de milliers. Alors que faire ? les corriger lui-même ?
Faisons une parenthèse. Dans une République démocratique, ça se passerait comment ? Dans une République démocratique, le ministre convoquerait immédiatement les représentants syndicaux et même les élus des AG de grévistes pour leur dire « oh là les gars, on discute, y’a visiblement un problème, je vous promets qu’on discute tout de suite et vous rentrez vos notes ». Dans une République démocratique un tel comportement honorerait, grandirait et renforcerait le ministre agissant ainsi. Fermons la parenthèse.
Donc, dans notre république réellement existante, il fait quoi, le Blanquer ? Il INNOVE ! Il invente un truc GE-NIAL : les notes non rentrées seront remplacées par la moyenne de l’année de Terminale dans la discipline correspondante, et si par la suite la note de Bac s’avère inférieure à cette moyenne elle ne comptera pas ! Très fier, le citoyen Blanquer, d’avoir trouvé LA PA-RA-DE !
Bien entendu, ce jeudi 4 juillet où se réunissent les jurys dans toute la France, les collègues non grévistes mais solidaires, ou simplement peu soucieux de mettre en œuvre des consignes illégales passibles d’une condamnation, puisqu’il s’agit d’inventer des notes et de rompre l’égalité, refusent cela, et par conséquent le nombre de candidats risquant demain matin de ne pas voir leur résultat affiché augmente !
Voila où mène l’irresponsabilité au sommet de l’État. Vous avez dit prise d’otage ? On voudrait tout casser qu’on ne s’y prendrait pas autrement? Veut-on tout casser ? Telle n’est ni l’intention, ni la vocation, des professeurs. Mais ils en ont assez. Assez de l’incompétence programmée. Assez du bricolage et de l’affolement comme méthode de « gouvernance ». Nous n’en sommes qu’à la première moitié de la « réforme » et c’est panique à bord. Comme on dit en pédagogie comportementale : « il faut savoir fixer des limites » !