Les suppressions de postes dans l’académie de Clermont-Ferrand.

Dans l’Académie de Clermont-Ferrand, le « dialogue rénové de gestion » entre le recteur Besson et le ministre Chatel a accouché de 286 suppressions de postes d’enseignants, 104 dans le premier degré, ce qui fait 1,2% des personnels, et 182 dans le second degré, soit 2,5% des personnels, et 10 suppressions de postes d’administratifs.

Nous sommes l’une des académies « plus victime que les autres » (étant entendu que toutes les sont). Nul doute que la démographie régionale soit invoquée par les « décideurs » pour justifier le fait : on entend la même chose dans le Nord et l’Est de la France. Agir sur la démographie et les mouvements de population (qui résultent des offres d’emplois) par une politique volontariste d’offre de service public demanderait bien sûr … de virer les dits décideurs.

Réforme territoriale et atteintes au service public d’éducation en Auvergne.

L’articulation forte entre la casse du service public national et laïque de l’éducation et la « réforme territoriale » est une caractéristique qu’il faut savoir repérer en Auvergne.

NB : Au moment d’écrire cet article, je ne disposai pas des chiffres régionaux pour l’enseignement agricole public. L’expérience du lycée de Lapalisse, conduit à la fermeture à la suite d’une politique de regroupement largement pilotée par le Conseil régional et qui était censée (mais on pouvait en douter …) sauver le site, pourrait être ajoutée aux éléments présentés ici.

Un serpent de mer : les « petits collèges ».

Le recteur Besson a déclaré à l’AEF le 16 décembre (voir le site académique du SNES) : « Le secteur où nous allons gagner des emplois est celui des collèges de moins de 100 élèves ». Avis de tempête sur les petits collèges de la partie sud de l’académie. Dont les élèves iraient grossir les effectifs des gros collèges eux-mêmes confrontés aux classes surchargées et aux suppressions de postes …

La pression de l’Etat étant relayée par les élus -de toutes tendances- le conseil général du Puy-de-Dôme a décidé de « réfléchir sur l’avenir des collèges ruraux » …

De telles « réflexions », nous le savons bien nous autres syndicalistes, sont cadrées et pré-dirigées depuis longtemps par des rapports et des statistiques en eux-mêmes incontestables qui établissent que les élèves sortant de ces établissements plus petits s’en sortent moins bien. Ce que ces rapports et statistiques ne disent jamais, c’est en quoi ils s’en sortent moins bien parce que leur collège est depuis des années victime d’une politique délibérée de chien crevé au fil de l’eau, avec des classes peu nombreuses mais parfois surchargées quand même, des locaux et du matériel obsolètes, et des enseignants à cheval sur plusieurs établissements, ou parce que leur collège aurait le défaut d’être « petit ». Elles ne disent pas non plus si ces enfants, souvent issus de territoires défavorisés, s’en sortiront mieux une fois immergés dans de « grands » collèges …

Serpent de mer encore : les EPEP (établissements publics locaux d’enseignement primaire) et leurs avatars.

Nationalement, l’adaptation de l’organisation scolaire à la réforme territoriale est synthétisée dans un rapport remis au premier ministre en septembre dernier, le rapport Reiss, qui dans son premier point préconise d’instituer les regroupements scolaires en catégorie juridique, et d’inciter les autorités académiques à susciter de tels regroupements tout en les faisant coller à la carte des intercommunalités, sachant que les préfets doivent, suite à la réforme territoriale, définir courant 2011 les SDCI, Schémas Départementaux de Coopération Intercommunale -la carte des intercommunalités et de leurs compétences, dont la compétence scolaire. Par ce biais le glissement de la gestion de la carte scolaire du 1° degré vers les préfectures est rendu possible.

L’Inspecteur d’Académie de l’Allier a annoncé avoir ouvert une concertation informelle avec les élus locaux pour inciter les communautés de communes à prendre la compétence scolaire, déplorant le fait que dans son département, la quasi totalité des RPI (regroupements pédagogiques intercommunaux) voient les communes se partager les niveaux de classes (ce sont des RPI « déconcentrés »), au lieu de tout regrouper dans une même commune. Cette caractéristique se retrouve dans le Puy-de-Dôme et le Cantal.

Les RPI, du point de vue du pouvoir politique, ont été souvent « détournés » de leur but -grouper les écoles et fluidifier les fermetures de classe- en raison de cet attachement profond au maintien du lien entre école primaire et commune et de l’impact sur la vie locale d’une vie scolaire maintenue.

On connait par ailleurs la loi Carle qui contraint les communes à payer si des élèves se rendent dans des écoles privées extérieures à la commune, en l’absence d’école publique sur le territoire communal. Il se trouve qu’un décret d’application de cette loi de début novembre considère qu’une classe de RPI déconcentré ne doit pas être prise en compte comme école publique présente dans la commune, sauf si celle-ci est adossée, justement, à un établissement public intercommunal ayant la compétence scolaire …

Complaisance envers le privé.

Ce qui nous conduit à cette autre caractéristique prononcée de l’application de la politique gouvernementale en Auvergne qu’est la complaisance envers le privé. La fermeture du Pensionnat Notre-Dame de France au Puy-en-Velay l’an dernier a mis sur le carreau 800 élèves (du primaire au Bac) et leurs familles, dont la majorité se sont retournés vers le service public. N’empêche que par un tour de passe-passe administratif les moyens publics affectés à l’ancien « Pensio » n’ont été ni supprimés, ni restitués au public, mais carrément transférés vers l’établissement privé le plus proche. Miraculeux, n’est-ce pas ?

Il ne s’agit pas que du privé catholique, mais aussi des écoles patronales, telle l’Ecole des Carrières Supérieures à Vichy mise en faillite par des escroqueries et relancée par les fonds publics.

Depuis plusieurs années, on peut d’ailleurs observer en Auvergne que les prévisions anticipées de baisse d’effectifs dans les écoles, lycées et plus particulièrement les collèges sont régulièrement démenties en raison notamment d’une érosion non intégrée dans les statistiques rectorales, bien que connue, des effectifs du privé, vers le public. Ce n’est pas pour autant que celui-ci bénéficie de proportionnellement plus de moyens, ni même d’une amputation relative moins forte …

Paritarisme ou concertation informelle régionalisée …

Enfin, la centralisation de la gestion au niveau régional au moyen des suppressions de postes et de l’informatique, et les projets de transformation des départements en instances subsidiaires des régions, conduisent déjà nos responsables rectoraux à pratiquer la « concertation informelle », là encore, pour inciter à déshabiller les Comités Techniques départementaux leurs attributions concernant le second degré, en vue de tout centraliser au niveau académique.

Cependant qu’à ce niveau pourtant, il existe une instance, le CAEN (Conseil Adadémique de l’Education Nationale), où sont représentés les élus, les parents, les syndicats … qui, au mépris de loi, n’a pas été réunie depuis largement plus d’un an : on est censé y débattre de manière transparente des politiques et des décisions prises en matière d’enseignement et de leurs répercussions dans la région …

Vincent Présumey (secrétaire départemental FSU Allier), fin décembre 2010.